Dans un climat de contestation, Paul Biya, doyen des chefs d'État dans le monde, a prêté serment pour un nouveau septennat. La cérémonie solennelle à Yaoundé ouvre une ère politique inédite qui pourrait le maintenir au pouvoir jusqu'à l'âge de 99 ans.
C'est dans l'enceinte de l'Assemblée nationale à Yaoundé que Paul Biya, âgé de 92 ans, a officiellement été investi pour un huitième mandat en tant que président de la République du Cameroun . Le monde assiste ainsi à l'installation du plus ancien et du plus âgé des chefs d'État actuellement en fonction.
La cérémonie de prestation de serment – l'acte officiel par lequel un dirigeant s'engage à remplir ses fonctions – s'est déroulée selon un protocole bien rodé . Comme le veut la tradition, un salut de 101 coups de canon a retenti alors que le cortège présidentiel quittait le "Paul Biya Glass House" pour se rendre au Palais de l'Unité, marquant de façon spectaculaire le début de ce nouveau chapitre politique .
Une victoire électorale contestée dans un contexte tendu
Le scrutin présidentiel du 12 octobre 2025, dont le taux de participation s'est établi à 57,76 %, a été remporté par Paul Biya avec 53,66 % des voix selon le Conseil constitutionnel . Son principal adversaire, Issa Tchiroma Bakary, arrivé en seconde position avec 35,19 % des suffrages, a immédiatement rejeté ces résultats, qualifiant l'élection de "mascarade" et se proclamant vainqueur dès le 14 octobre .
Cette période d'incertitude a plongé le pays dans une forte tension. Des manifestations ont éclaté dans plusieurs villes, notamment à Douala, Dschang, Garoua, Maroua, etc., où des affrontements entre les forces de sécurité et les sympathisants de l'opposition ont causé la mort de plusieurs civils . Pour faire face à la contestation, un interdit sur les rassemblements publics avait été décrété et des perturbations internet avaient été enregistrées .
Les promesses d'un nouveau mandat
Dans son discours d'investiture, le président Biya a exprimé sa "profonde gratitude au peuple" pour sa confiance et son "précieux soutien" . Il a promis de "ne ménager aucun effort pour continuer d'être digne" de cette confiance et a placé "la situation des jeunes et des femmes au cœur de [ses] actions" .
Son programme politique est structuré en 11 engagements majeurs. Il promet notamment de :
· Poursuivre les efforts de paix dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en crise .
· Lancer une "véritable révolution agricole" et un Plan directeur d'industrialisation
· Accélérer le processus de décentralisation en élargissant les pouvoirs des autorités locales .
· Renforcer la lutte contre la corruption et les atteintes aux biens publics .
Un règne historique qui se poursuit
Cette inauguration consacre une longévité politique exceptionnelle. Paul Biya, qui a pris les rênes du pays pour la première fois en 1982, n'est que le deuxième président du Cameroun depuis son indépendance . La suppression de la limitation du nombre de mandats en 2008 lui a permis de se représenter indéfiniment . S'il mène à son terme ce nouveau mandat de sept ans, il dirigera le pays jusqu'à l'âge avancé de 99 ans .
Alors que la cérémonie d'investiture s'achevait dans la capitale, la question de l'unité nationale reste entière. L'appel du président Biya à la formation d'un "gouvernement de l’union sacrée" résonne comme une tentative d'apaisement dans un pays où la fracture entre le pouvoir et une opposition déterminée semble plus profonde que jamais . Les prochains mois diront si ce nouveau mandat parviendra à reconcilier un Cameroun divisé.
DEJIO M.