Dans une lettre ouverte explosive, l’ancien ministre démissionnaire Issa Tchiroma Bakary annonce sa candidature à la présidentielle d’octobre 2025 et lance un appel vibrant pour une transition démocratique. Retour sur un plaidoyer percutant pour un « Cameroun nouveau ».
« L’élection présidentielle est bien plus qu’un scrutin. C’est un rendez-vous intime entre une nation et sa conscience. » Dès les premières lignes de sa lettre, Issa Tchiroma Bakary, ministre démissionnaire, plante le décor d’un discours empreint d’urgence et d’espoir. Il rend hommage aux héros de l’indépendance, ces « femmes et hommes qui ont choisi la dignité, la lutte, la liberté », et appelle à rejeter les divisions tribales et communautaristes qui menacent, selon lui, « le pacte national ».
« Notre peuple est à bout. Il étouffe. Il souffre. Il attend. Il espère », lance-t-il, dépeignant un Cameroun au bord de l’implosion. Un constat sévère qui justifie, à ses yeux, une rupture radicale avec le système actuel.
« Le pouvoir au peuple »
« Trop, c’est trop » : cette phrase résume l’état d’esprit que Tchiroma Bakary attribue aux Camerounais. Pour lui, le modèle politique actuel, « érigé en rempart de stabilité », a fini par « étouffer les élans de progrès » et « briser la confiance entre l’État et les citoyens ».
Sa solution ? Une alternance pacifique mais ferme, portée par un « sursaut collectif ». « L’élection d’octobre doit être un acte de vérité démocratique », insiste-t-il, exigeant un « scrutin libre » et une passation transparente. Sans nommer Paul Biya, il glisse : « Le moment est venu pour le régime en place de se retirer avec dignité. »
Son programme repose sur trois piliers :une démocratie vivante, avec une réforme électorale prioritaire; un État juste, garant des libertés et de l’ordre républicain; une jeunesse au cœur du pouvoir, via des politiques d’innovation et d’emploi.
Sécurité, unité nationale et décentralisation : les chantiers clés
Face aux défis sécuritaires – Boko Haram, crise anglophone, insécurité urbaine –, Tchiroma Bakary promet une « nouvelle doctrine » : armée professionnelle, justice efficace et refus de l’impunité. « Un État fort n’est pas un État brutal », nuance-t-il, évoquant la mort du jeune Mathis à Yaoundé, symbole d’un « pays où même l’enfance n’est plus épargnée ».
Sur la question anglophone, il prône le dialogue et une refonte territoriale. « La centralisation a échoué », assène-t-il, proposant un référendum pour une « nouvelle forme de fédéralisme choisie par le peuple ». Une position audacieuse dans un débat longtemps tabou.
Jeunesse, femmes et travailleurs : les priorités sociales
Le candidat mise sur la jeunesse, promettant un « Fonds National d’Initiative Jeunesse » pour financer startups et formations tech. « Le Cameroun de demain sera jeune, ou ne sera pas », clame-t-il.
Les femmes, « piliers silencieux de la société », bénéficieraient d’un programme dédié (crédits, formations, accès aux soins). Quant aux travailleurs, il s’engage à revaloriser les salaires et à lutter contre la précarité. « Le travail ne doit plus être un facteur d’épuisement, mais une source de dignité », martèle-t-il.
Économie et diplomatie : ambition et souveraineté
Tchiroma Bakary veut relancer l’agriculture (irrigation, modernisation) et l’industrie, pour réduire les importations. « Le Cameroun nourrira le Cameroun », promet-il, visant l’autosuffisance alimentaire.
Sur le plan international, il prône une diplomatie « sans soumission », mêlant coopération et fermeté. « Le Cameroun ne mendiera pas sa place. Il la prendra », affirme-t-il, en référence aux partenariats économiques.
Un appel à l’union sacrée
« Le temps n’est plus à l’attente. Le temps est à l’action », conclut le candidat, invitant tous les Camerounais – diaspora incluse – à écrire « une page nouvelle ». Son mot d’ordre, répété comme un mantra : « Le pouvoir au peuple ! »
Avec ce manifeste, Issa Tchiroma Bakary se pose en tribun d’un Cameroun assoiffé de renouveau. Reste à savoir si sa voix portera au-delà des mots. À quelques mois de la présidentielle, le vent du changement souffle de plus en plus fort.
DEJIO M.