Sikoum, le charnier de l'horreur

Sikoum, le charnier de l'horreur

La découverte macabre d’un charnier à Sikoum, près d’Édéa, avec 11 squelettes, 4 corps et 2 survivants, plonge le Cameroun dans l’effroi. Cette tragédie met en lumière les défaillances criantes d’un État incapable de garantir la sécurité et les droits fondamentaux de ses citoyens. Alors que les autorités restent silencieuses, les questions s’accumulent : comment de tels crimes ont-ils pu être perpétrés sous le nez des forces de sécurité ?

Le 18 février 2025, un charnier contenant 11 squelettes, 4 corps en décomposition et 2 personnes miraculeusement vivantes a été découvert à Sikoum, dans la région de la Sanaga Maritime. Cette trouvaille macabre, non loin du péage d’Édéa, a jeté une lumière crue sur les disparitions inquiétantes de motos-taxis et de chauffeurs dans les villes de Yaoundé, Douala et ailleurs. Les images insoutenables de corps abandonnés dans la broussaille ont choqué l’opinion publique, rappelant que le Cameroun est loin d’être à l’abri de l’horreur.

Le préfet de la Sanaga Maritime s’est rendu sur place pour présenter ses condoléances aux familles et annoncer des mesures d’urgence : patrouilles renforcées, recensement des travailleurs agricoles et création d’un forum d’échange entre motos-taxis et forces de sécurité. Mais ces actions, bien que nécessaires, semblent bien dérisoires face à l’ampleur du drame.

Les droits humains bafoués
Cette tragédie met en évidence des violations graves des droits humains, tels que garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). L’article 6 du PIDCP stipule que « le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa vie. » Pourtant, les victimes de Sikoum ont été privées de ce droit fondamental, abandonnées dans une broussaille sans que personne ne s’en émeuve.

L’article 9 ajoute que « tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. » Or, les disparitions répétées de motos-taxis et de chauffeurs, ainsi que la découverte de ce charnier, montrent que l’État a échoué à assurer cette sécurité. Les familles des victimes, plongées dans l’angoisse et le deuil, sont également privées de leur droit à la vérité et à la justice.

Le silence assourdissant de l’État
Deux jours après la découverte, le silence des plus hautes autorités est assourdissant. Ni le Président de la République, ni le Premier Ministre, ni les responsables de la sécurité n’ont pris la parole pour rassurer les populations. Ce mutisme rappelle d’autres tragédies récentes : les massacres de Boko Haram dans l’Extrême-Nord, les milliers de morts dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ou encore les inondations meurtrières du Mayo Danay. À chaque fois, l’État semble absent, comme si la vie des Camerounais ne méritait ni attention ni compassion.

Les forces de sécurité, souvent promptes à réprimer les manifestations pacifiques, comme lors des Marches de 2019 et 2020, semblent incapables de prévenir de tels crimes. Les multiples barrières de contrôle sur la route Douala-Yaoundé, censées garantir la sécurité, n’ont pas empêché les enlèvements et les exécutions sommaires. On peut légitimement se demander si ces dispositifs servent davantage à surveiller les opposants qu’à protéger les citoyens.

Un contexte national alarmant
La tragédie de Sikoum n’est malheureusement pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans un contexte national marqué par une insécurité grandissante et une gestion chaotique des crises. Les Camerounais vivent dans une psychose permanente, entre les attaques de Boko Haram, les conflits dans les régions anglophones, et les catastrophes naturelles à répétition. Chaque jour, des vies sont perdues, des familles sont brisées, et l’État semble impuissant, voire indifférent.

Urgence et transparence
Face à cette situation, le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) exige des réponses claires et rapides. Le parti dirigé par Maurice Kamto, leader de l’opposition camerounaise, demande au Président de la République et au Gouvernement de rompre leur silence et de rassurer les populations. Il appelle également à une enquête parlementaire pour établir les responsabilités et à une collaboration franche entre les autorités et les citoyens.

Sikoum est le miroir d’un Cameroun en crise, où les droits humains sont bafoués et où l’État semble avoir abdiqué son rôle de protecteur. Alors que les familles des victimes pleurent leurs proches, une question demeure : combien de charniers faudra-t-il découvrir avant que l’État ne se réveille ? 

DEJIO M.