Dans le village de Nkout 2, à Sangmélima, région du Sud, un chef traditionnel est au cœur d’une polémique violente. Accusé d’avoir brutalement réprimé des militants de l’opposition, il a détruit une plaque du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) et infligé des sévices à un militant. Ces actes, qualifiés de « barbarie » par les victimes, soulèvent des questions sur le respect des droits humains et la liberté d’expression à quelques mois de l’élection présidentielle d’octobre 2025.
Le village de Nkout 2, situé dans l’arrondissement de Sangmélima dans la région du Sud, est devenu l’épicentre d’un conflit politique opposant un chef traditionnel et des militants du MRC. Les événements récents, marqués par la destruction d’une plaque du parti et des violences physiques, ont suscité l’indignation de l’opinion nationale. Alors que le Cameroun se prépare à une élection présidentielle cruciale en octobre 2025, ces incidents rappellent les tensions politiques et les défis liés à la liberté d’expression et d’opinion dans le pays.
Une répression violente dénoncée par le MRC
Le 2 février 2025, le chef traditionnel de Nkout 2, Nkoumou Ze Paul, a détruit la plaque du MRC érigée dans la cour du responsable local du parti. Dans une vidéo qu’il a lui-même fait filmer, le chef apparaît entrain de détruire la plaque du MRC à l’aide d’une barre de fer. Selon Jules Blaise Abossolo, le régional du MRC dans le Sud, « Le Chef a agi avec une violence inouïe et une arrogance à nulle autre pareille ». En plus de cette destruction, le chef et ses acolytes ont battu Zakaria Pierre, un militant du MRC, le laissant pour mort à son lieu de service. « Ils l’ont frappé avec un serre-joint. Tout son corps lui fait mal », témoigne Npwang Engamba Jean Noel, responsable MRC de Nkout 2.
Le chef traditionnel, Nkoumou Ze Paul, justifie ses actes en invoquant le respect de la légalité et dit avoir le soutien de l’autorité administrative locale. « Je ne peux pas agir ainsi quand je sais que les gens sont dans la légalité. Ils n’ont pas d’autorisation de la sous-préfecture pour manifester ou installer un bureau », explique-t-il. Cependant, les responsables du MRC affirment avoir informé les autorités locales de leur projet. « Nous avons saisi les autorités de Sangmélima avant l’installation du bureau », insiste Jules Blaise Abossolo.
Guyzo Mono, une élite ressortissante de Sangmélima, interpelle directement l’État dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux : « Ce monsieur [le chef de Nkout 2] doit savoir qu’il est en infraction, et que la justice va s’en occuper. Nous ne sommes plus dans un monde de sauvages où de petites intimidations de petits chefs de village vont faire croire qu’ils vont dire aux populations comment voter. » Il ajoute, s’adressant au Chef incriminé : « La justice va s’occuper de toi. »
La responsabilité de l’État en question
Ces incidents violent plusieurs articles de la Constitution camerounaise et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). L’article 2 de la Constitution garantit la liberté d’expression et d’association, tandis que l’article 7 du PIDCP interdit la torture et les traitements inhumains. Les actes du chef traditionnel, soutenus par des accusations de « bastonnade » et de destruction de biens, constituent une atteinte grave à ces droits.
L’État camerounais, en tant que garant des droits humains, a la responsabilité de protéger ses citoyens contre de telles violations. Pourtant, l’absence de réaction officielle face à ces événements soulève des questions sur son engagement à faire respecter la loi. L’État doit pourtant intervenir pour enquêter sur ces allégations de violence et s’assurer que les droits des citoyens sont respectés. La démocratie ne peut prospérer que dans un environnement où la loi est appliquée de manière équitable et où les droits de tous sont protégés. L’affaire de Nkout est un rappel brutal de l’importance de ces principes.
Sangmélima, un symbole fort dans le paysage politique camerounais
Sangmélima, berceau du président Paul Biya, est un symbole fort dans le paysage politique camerounais. Alors que le président, âgé de 92 ans, pourrait se représenter en octobre 2025, ces incidents illustrent les tensions politiques croissantes dans la région. Les partis d’opposition, comme le MRC, dénoncent une répression systématique visant à étouffer leur voix.
Les événements de Nkout 2 mettent en lumière les défis auxquels fait face le Cameroun à l’approche des élections de 2025. La répression des militants de l’opposition, les violences physiques et les atteintes à la liberté d’expression rappellent l’urgence de renforcer les mécanismes de protection des droits humains. Alors que la justice est appelée à intervenir, il est crucial que l’État camerounais assume son rôle de garant des libertés fondamentales car le respect de la démocratie et des droits humains doit primer, pour un Cameroun plus juste et pacifique.
Etienne TASSE