Inspecteur des affaires sociales et délégué régional des Affaires sociales à l’Ouest, il entend agir sur tous les fronts pour soutenir ces personnes en détresse, et plus particulièrement les enfants.
Q : Les déplacés internes de la crise anglophone sont confrontés à de nombreux problèmes dans la région de l’Ouest. Comment réagissez-vous face à cette situation, notamment celle de ceux dépourvus de leurs actes de naissance ou pièces d’identité ?
La situation des déplacés internes de la crise anglophone commande de nombreuses obligations. Nous devons les accompagner et les soutenir. Dans le cadre du programme de reconstruction et de réconciliation prescrite par le chef de l’Etat et mis en œuvre par le Premier Ministre, des actions sont envisagées non seulement pour la reconstruction des maisons incendiées ou détruites, mais aussi pour la reconstitution des pièces officielles, y compris des actes de naissance. Pour ce qui concerne les déplacés qui ne peuvent plus retourner chez eux, nous les recensons en vue de les aider à reconstituer leurs actes de naissance et autres documents officiels détruits ou perdus. Les enfants occupent une place de choix dans notre déploiement. Ainsi, courant juin dernier, lors de la célébration de la journée de l’enfant africain, nous avons, au niveau des trois arrondissements de la ville de Bafoussam, mener des actions de solidarité en direction des enfants déplacés internes de la crise anglophone. Des kits de lutte contre le covid 19 ont été remis à ces derniers. Grâce au soutien de l’Organisation des nations unies pour l’enfance (Unicef), ils ont reçu des paquets substantiels. Nous avons aussi, avec le soutien de nos partenaires, pris des dispositions afin qu’ils abordent la rentrée scolaire avec plus de sérénité.
Q : Combien de familles et d’enfants ont été aidés ?
Les orphelinats qui accueillent les enfants dans différentes contrées de la région de l’Ouest font l’objet de notre attention particulière. Au plan logistique et matériel, nous apportons un minimum à ces maisons d’accueil : 32 familles de personnes déplacées dont 240 enfants ont reçu notre soutien. La Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) a mis une enveloppe de 1 million de francs Cfa à notre disposition via le ministère des Affaires sociales. Cet argent a servi pour la cause des déplacés internes de la crise anglophone. Lors de la journée mondiale des personnes âgées courant octobre passé, nos actions de solidarité ont été dirigées vers la cible des déplacés et personnes âgées. Au niveau des huit départements de la région de l’Ouest, nous veillons à ce que cette opération d’assistance soit constance et soutenue. Dans le département du Koung-Khi par exemple, nous avons apporté notre caution pour le soutien à la rentrée scolaire des enfants des personnes déplacées. Nous ciblons plus de 2000 personnes déplacées pour des actions plus fortes dans les prochains jours avec le concours des organisations partenaires. L’engagement du ministère de la Santé, de celui des Enseignements secondaires, de l’Education de base ou du ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle à l’endroit de ces déplacées ne saurait être négligé. Avec le Minefop, il sera question d’identifier les métiers liés à l’environnement dans lequel vivent les personnes déplacées et les former afin qu’ils puissent être financièrement autonomes. Sous notre impulsion, un service social a été créé au sein du lycée classique de Bafoussam pour le suivi et l’assistance sociale à apporter aux déplacés internes scolarisés.
Q : Quelle est la stratégie mise sur pied pour optimiser votre mission
Nous recensons les déplacés. Je ne peux pas prétendre que tout le monde a été recensé. L’enquête sociale aboutit à un rapport. L’enquêteur doit y mentionner ses constatations et les solutions qu’il préconise. L’assistance psychosociale est une démarche qui vise au rétablissement des personnes à travers une approche collective centrée sur la connaissance des besoins individuels et du processus de deuil. Appui psychosocial est le nom donné à une démarche à la frontière du domaine de la psychologie de crise, de la victimologie et des secours. Nous utilisons aussi cette approche, surtout pour motiver le travailleur social assez submergé. Nous quittons parfois ici à plus de 21h parce qu’il faut écouter et orienter tout le monde. Je prends le cas d’une déplacée qui est arrivée ici avec une grossesse presque à terme, nous l’avons immédiatement dirigée vers l’hôpital régional. L’enfant est né dans de bonnes conditions.
Q : Comment motivez-vous les travailleurs sociaux, qui alignent beaucoup d’heures de travail?
La santé est à la fois physique et mentale. Vous devez pouvoir subvenir à vos propres besoins avant d’aider les autres, notamment les déplacés internes. Nous veillons à ce que le personnel social soit équilibré avant de se mettre à l’écoute des personnes en difficulté. Le soutien psychosocial consiste à aider ces personnels à comprendre le type de stress qu’ils subissent au travail et à renforcer leur capacité d’y faire face. On les informe sur les méthodes pour prendre soin d’eux-mêmes et obtenir l’aide de leurs pairs, par exemple en mettant en place des systèmes de soutien. C’est important car des travailleurs sociaux en bonne santé prennent mieux soin de leurs patients. Avant tout, les membres du personnel doivent avoir le sentiment que leurs chefs les comprennent et les soutiennent. L’esprit d’équipe est extrêmement important.
Je suis toujours en contact avec mes collaborateurs dans les départements et les arrondissements. Les effets positifs sont immédiats : lorsqu’un soutien psychosocial est assuré et que les responsables sont attentifs à ces questions, les personnels de santé prodiguent de meilleurs soins, restent motivés et peuvent continuer à travailler.
Propos recueillis par Guy Modeste DZUDIE (JADE)